Enfants surdoués : plus de filles que de garçons ?
Y a-t-il des inégalités de genre autour de la douance et des zèbres ?
Myriam Haegel (rédactrice en chef de Madmoizelle) met les pieds dans le plat : et s’il y avait plus de petites filles surdouées que de petits garçons ? Et si la douance était une question de genre ? Des chiffres, des explications et un documentaire passionnant à découvrir sur Netflix si votre petit garçon est hypersensible. Avant de vous laisser avec son article exclusif et qui m’a un peu scotché, notamment sur les chiffres d’adultes allant consulter un psy, quelques mots personnels, comme à chaque fois.
Nous sommes le 11 novembre et il pleut comme tous les 11 novembre depuis ma naissance. Moral ? stable ! Colère contre un président perdant refusant de concéder sa défaite ? élevée ! Mais vous savez pourquoi, je suis zèbre et pour moi, la justice est une valeur très, très importante.
Comment vivre dans un monde où les perdants refusent de reconnaître qu’ils ont perdu ? Comment expliquer aux enfants que la vie est faite de victoires, de défaites et que ce qui fait tout son sel, c’est précisément ces moments où on comprend pourquoi ça n’a pas marché, qu’on l’admet, qu’on l’analyse et qu’on se forge un mental de gagnant pour retenter le coup. Quel intérêt de jouer à un jeu où l’on gagnerait sans cesse ? Quel intérêt de vivre dans une société où on fait semblant de demander votre avis pour ne pas en tenir compte (on appelle ça le mauvais management, il paraît).
J’ai dans mon cercle proche un ami d’ami qui triche aux jeux de société. Il est adulte, il est père de famille, il déteste perdre. J’ai beau essayer de comprendre, je n’y arrive pas. Il le dit lui-même : je suis un ancien sportif de haut niveau, je ne joue pas pour perdre.
Du coup, il ne trouve plus personne pour faire un Monopoly avec lui. On connaît le truc : il planque des billets aux toilettes et profite d’une pause pipi pour se renflouer en argent magique.
Il a 42 ans.
Il n’y a pas de morale à mon histoire.
Je perds toujours mes mots devant l’inexplicable. Seule demeure la colère.
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La douance, une question de genre ?
Par @Mymyhgl
Dans la savane, il est difficile de faire la différence entre les zèbres mâles et femelles (qui s’appellent, pour votre culture générale, des zébrelles). Et chez nous, les zèbres à deux pattes, le genre doit-il être un sujet ? C’est la question que nous allons nous poser aujourd’hui.
Y a-t-il des inégalités de genre autour de la douance ?Qu’est-ce qui mène les enfants HQI au diagnostic ? Souvent une difficulté à s’adapter, notamment en cours : un ou une élève qui « s’ennuie » à l’école, donc assouvit son besoin de connaissances et de divertissement en faisant autre chose, que ce soit dessiner sur tous ses cahiers ou distraire ses camarades.
Selon une idée reçue tenace, cette mécanique mènerait moins de filles à être diagnostiquées, car on les éduque à être plus calmes, moins turbulentes que leurs frères. Une enfant à haut potentiel dérangerait moins en classe qu’un garçon zèbre, et ne serait donc pas « identifiée » comme ayant besoin d’un suivi particulier. Mais dans La petite noblesse de l'intelligence : Une sociologie des enfants surdoués, Wilfried Lignier remet en question cette croyance pas vraiment étayée par des chiffres :
« Ainsi de la précocité intellectuelle des filles, qui serait régulièrement masquée, par rapport à celles des garçons, par leur calme et leur sens de la discipline à la maison et à l’école […] Cette vision militante des choses ne s’appuie en général sur aucune épreuve de réalité »
Toujours au sujet de cette potentielle inégalité de genre, Wikipédia liste plusieurs études contradictoires :
« Diverses études menées montrent que le nombre de hauts potentiels est relativement équivalent entre les sexes : les études de Pereira-Fradin (2006) affirment qu’il y aurait plus de jeunes filles haut potentiel, alors que les études de Terrassier (1989) montrent un constat inverse. Winner (1996) quant à lui explique ces résultats contradictoires par le fait que le nombre de filles haut potentiel diminue au fur et à mesure que les années d’études augmentent. »
Vous l’aurez compris, il est difficile d’établir précisément s’il y a plus de garçons ou de filles HQI, et si cela est dû à une réalité biologique ou à des inégalités sociales. Mais cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas regarder les zèbres sous le prisme du genre, pour assurer à chacun et chacune une vie épanouie !
Quand les stéréotypes de genre se heurtent à la douance
« Sois un homme, ne pleure pas » : une phrase douloureuse, entendue par tant de garçons qu’elle est devenue la base de l’excellent documentaire sur les masculinités The Mask You Live In (à voir d’urgence sur Netflix !).
La douance s’associant souvent d’une sensibilité accrue, d’une empathie décuplée, elle peut être difficile à vivre pour les hommes (jeunes ou non) auxquels on a inculqué, bien malgré eux, que pleurer ou montrer ses émotions est une honte.
Il conviendra donc d’accompagner les garçons HQI dans la découverte et l’approche de leurs sentiments, sans nier le fait que leur sensibilité est particulière et surprendra peut-être leurs congénères, mais qu’ils ne doivent ni en avoir honte, ni la renier : elle fait partie d’eux, et fera leur force plus que leur faiblesse !
À noter qu’il est essentiel que le père, s’il est présent, et qu’il soit biologique ou non, s’implique aussi dans cette démarche car il a aux yeux de son ou ses fils une place différente de celle de la mère, comme l’expliquait en 2004 Daniel Paquette dans la Revue de psychoéducation.
Du côté des filles, la question de la sensibilité se pose moins : on n’est pas « moins une femme » si on verse une larme. Cependant le rapport à la douance peut tout de même être touché par leur genre, en se heurtant au fameux syndrome de l’imposteur, qui concerne potentiellement tout le monde, mais revêt quelques spécificités lorsqu’on l’associe aux stéréotypes de genre.
Les filles et les femmes peuvent se considérer moins pertinentes, compétentes, légitimes, gangrenées par cette impression tenace de « faire semblant » — d’être douées, intelligentes, d’avoir de bonnes idées, de mériter leur place au soleil. Il est utile de garder cela en tête et d’agir en conséquence, par exemple en multipliant les retours positifs et en faisant attention à ce que les victoires des filles ne soient pas attribuées à autrui !
Et pour finir, en ouverture, sortons un peu du focus sur les enfants surdoués pour se pencher sur les adultes. Selon plusieurs enquêtes compilées par l’Institut Français d’EMDR, 70% des personnes consultant un psy, en France, sont des femmes. Les hommes HQI qui n’ont pas été diagnostiqués dans l’enfance peuvent donc passer toute leur vie à ignorer leurs spécificités et à ne pas être accompagnés. Levons le tabou sur la santé mentale tout court, et sur celle des hommes plus spécifiquement, afin de permettre au plus grand nombre de vivre une existence épanouie !
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#HPI #Précoce #Hypersensible