Les livres délivrent
Ça m’est devenu de plus en plus compliqué de lire un livre tellement je suis obsédé par les écrans et les bêtises qu’on y trouve. Le dernier endroit finalement où je ne touche plus mon portable pendant 90 minutes reste le cinéma et je constate que c’est très compliqué pour certaines des personnes présentes, à mon grand agacement. À chaque fois, j’ai envie de leur hurler : “TU ES CHIRURGIEN DU COEUR ET ON T’ATTEND AU BLOC ?”
Mais comme tout le monde ou presque semble porter un couteau de nos jours, je me tais. Oui, je me tais.
Je me suis remis à lire le mois dernier en me promettant que je devais avaler minimum un livre par mois. Je veux m’y tenir. J’en ai déjà fini deux. Pour ma santé mentale, principalement. Pour ne pas complètement devenir gaga avec l’IA qui déjà grignote pas mal de mes activités et ensuite parce qu’il me reste à lire avant “la fin” encore quelques dizaines de bouquins, pas plus, et que c’est d’une telle tristesse d’avoir son attention captée par des vidéos débiles de sept secondes qui ne servent à rien. Pourtant, j’y reviens encore et encore. Et encore.
Dans les transports en commun, j’envie la personne (la dernière) qui lit un livre pendant que nous tous sommes glués par nos écrans. Dans le train, la semaine dernière, alors que j’avalais l’excellent Depardieu, une affaire très française de Raphaëlle Bacqué, le jeune homme à côté de moi, de la première seconde à la dernière seconde du voyage de six heures n’a pas lâché l’écran de son téléphone. De temps en temps, dans les gares, je regardais mes messages mais je m’astreignais à revenir à mon livre.
J’ai commandé en ligne, en seconde main - il est arrivé de Croatie - la version intégrale de la Lumière des Justes, d’Henri Troyat, lu vers 1987 je pense et qui m’avait profondément marqué. Mon défi de l’été : le lire avant le 1er septembre. 1200 pages (5 ou 6 volumes) et l’espoir un peu fou de retrouver ce qui faisait le sel de mes journées ado : l’oubli de tout, sur le ventre, pendant des heures et des heures, à m’en faire mal aux poignets. Autant vous dire que désormais, lire sur le ventre même 20 minutes m’est impossible rapport à mes reins qui vont crier au supplice très, très rapidement.
J’ai édicté une règle, car je ne suis pas maso : 50 pages. Je donne 50 pages au livre pour devenir intéressant sinon j’abandonne. Si je m’étais écouté plus jeune, je n’aurais jamais lu Millenium ou le Diable et Marguerite mais c’est ainsi. J’ai donc acheté à prix d’or (puis reposé) quelques volumes commandés après avoir lu l’article dans Télérama “Les 25 chefs-d’œuvre de la littérature mondiale qui vont marquer le XXIᵉ siècle” car je n’avais pas la force de dépasser la 51ème page. Je ne lirai donc jamais “L’Infinie Comédie” de David Foster Wallace et je suis à deux doigts de larguer “La fin de l’homme rouge” dont les 40 premières pages sont un supplice.
J’ai une trentaine de livres dans la bibliothèque qui doivent donc correspondre logiquement aux deux années devant moi. Un jour à la fois.
William